Ne tergiversons pas trop longtemps, disons les choses simplement. Les chansons d’Etienne Daho, qu’on les aime ou pas, ont toujours accompagné les moments de nos vies intimes (il préfère dire Nos vies martiennes). C’est toujours incroyable d’écouter une chanson du Rennais et de se rendre compte que : « Oui, c’est ça, ce sont les mots que j’aurai voulus (te) dire à ce moment-là ! » C’en est presque devenu un piège : à chaque nouvel album, on se demande quelles histoires il va nous raconter qui seront une part de notre propre vie.
Quand il commence Corps et armes avec Ouverture (façon William Sheller qui débute tous ces concerts, à la manière classique, avec une ouverture), il prévient d’emblée : « Il n’est pas de hasard, il est des rendez-vous, pas de coïncidence / Aller vers son destin, l’amour au creux des mains, la démarche paisible ». Ca ne sera pas facile de louvoyer cette fois, on va en prendre pour notre grade, on va vivre une histoire difficile avec Daho à nos côtés. Effectivement, comme il avait accompagné nos dragues d’un soir avec Week-end à Rome, nos premiers voyages au lointain avec Paris ailleurs, il nous prévoit cette fois des lendemains qui déchantent.
Loin de l’univers branché tendance qui lui avait si bien réussi avec Eden, formidable album de musique festive paru il y a déjà quatre ans, Corps et armes donne plutôt à découvrir (ou à redécouvrir) un Etienne Daho tout en tendresse et romantisme. Comme à la fin d’un été qui aurait pu être symbolisé par son précédent album, les chansons de ce nouvel opus marquent un pas au cœur des festivités charnelles. « Et je me vois vraiment / Dans le miroir que tu me tends / Tel que je suis vraiment / Alors je cède et je me rends », dit-il dans Corps et armes. « Serre-moi fort, si ton corps se fait plus léger, nous pourrons remonter », assène-t-il dans La Nage indienne.
Les temps sont durs mais on va s’en sortir, on va renaître après les coups dans la gueule. En ce sens, on n’est jamais loin d’un Alain Chamfort des grands jours, quand il peut dire les pires méchancetés, balancer les quatre vérités mais en douceur, avec les mots qu’il faut. On n’est pas chez Murat qui remue le couteau dans la plaie. Chez Daho, on garde espoir, on « apprend à ne plus vivre seul ». Même si Daho semble déchanter quand vient le temps de la séparation, il rassemble ses forces, prend conseil et repart dans la vie avec une sagesse nouvelle. Une carrière à l’image de celle de son idole, Françoise Hardy, se poursuit donc pour lui. Vas-y Daho, tu n’es plus très loin de la sagesse de la Grande Dame…