Trompettiste d’origine suisse, Erik Truffaz s’était fait remarquer voici quelque temps à l’occasion de la sortie d’un premier album chez Blue Note. Il récidive cette fois sur le même label dans un genre un peu différent. On a en effet ici à faire à une musique qui mêle très habilement jazz et tous ces nouveaux courants : jungle, drum’n bass, hip-hop. L’implication du quintette est tellement évidente d’emblée qu’il est visible que l’on n’est nullement en présence d’une tentative de récupération d’un auditoire plus large par un producteur habile et peu honnête. Non, pas de ça ici. Des musiciens talentueux au service de ce qui est peut-être une voie d’avenir pour le jazz, une nouvelle révolution, pourquoi pas ? Après l’apport du rock dans les années soixante dix, pourquoi pas celui des nouveaux courants déjà cités pour l’an 2000. Le jazz n’a t’il pas tendance de nos jours à se sentir à l’étroit entre revivalistes, zélateurs du hard bop et nostalgiques du free ?
Les tentatives sont nombreuses et parfois réussies au rang desquelles on peut compter celle de Nils Peter Molvaer (CD Khmer chez ECM). La trompette davisienne d’Erik Truffaz fait des merveilles sur les harmonies du groupe, sur les phrases parlées, chantées, rappées de l’intriguant Nya (I’m driftin’, driftin’ within the four walls of my brain). Tous les musiciens sont d’un excellent niveau, mais on attribuera une mention spéciale à Patrick Muller, notamment dans son chorus au Fender Rhodes sur The Dawn, un modèle du genre. Mais il serait injuste de ne pas citer les apports, particulièrement dans The Dawn, de la basse lancinante de Marcello Giuliani, du jeu de balais électrisant de Marc Erbetta, enfin et surtout de la trompette brillante, incisive, parfois torturée de Truffaz.