Son nom ne dit sans doute pas grand-chose à une bonne partie d’entre vous, mais Michael Fakesch fait aujourd’hui partie des remixeurs et producteurs les plus recherchés, en duo avec Chris De Luca sous le nom de Funkstörung. L’an dernier, un album compilatoire de leurs exploits en studio, Additional productions, qui regroupait des relectures de Björk, Wu-Tang Clan, Finitribe, DJ Craze ou East Flatbush Project -joli tableau de chasse, tout de même-, avait créé une petite sensation (justifiée) dans les chaumières hype. Cet hiver, c’est tout seul que Michael Fakesch s’est collé aux manettes, pour pondre Marion, bon gros disque de collages sonores. C’est clair, Fakesch est un cador question manipulations. Il le démontre dès le premier titre, le bien nommé Demon-stration, qui résume parfaitement son art consommé du charcutage : ambiance minimaliste, rythmiques concassées mais tranquilles, sons déformés à l’extrême, souvent rendus à l’envers, sectionnés par des échos inversés, absorbants. Le premier quart d’heure, ça fait son petit effet. C’est un peu « Bienvenue dans le gentil monde tout clean des robots serviles ».
Malheureusement, il semble que Fakesch ait remisé au vestiaire toutes ses idées, ou bien qu’il les réserve en vue de futurs remixes. Peut-être d’ailleurs est-il plus à l’aise dans cet exercice, lorsque la base de travail lui est fournie et qu’il peut la triturer à l’envi. Car ici, on dira, pour se faire bien comprendre, qu’on s’emmerde quand même quelque peu. Cette forme d’ascétisme musical et tonal, sorte de postulat de départ pour Michael Fakesch, impose d’avoir des idées, d’alimenter sans cesse les morceaux en trouvailles. Mais rarement y parvient-il. En conséquence, Marion paraît bien sec. Sans doute trouvera-t-il certains amateurs.
Cependant, dans le royaume de plus en plus peuplé de l’electronica intelligente, cet album peinera à s’imposer comme un classique. Là où Aphex Twin, Orbital et quelques autres ont su réinventer les modèles créés par la génération Kraftwerk en y injectant une bonne dose de folie et d’esprit libertaire, Michael Fakesch se contente, apparemment, d’appliquer à la lettre les préceptes des aînés. Du coup, I:omac, Rand va, Diesehle ou Sega sont mignons, mais un rien fadasses, et tout au long de l’album, on reste totalement passif, admirant de-ci de-là quelques astuces de production, un son un poil différent. Merde alors, on est quand même en droit d’attendre autre chose de la musique électronique ! Marion est un disque pas mauvais, mais tellement décevant qu’il donne envie d’écouter du rock. Tant mieux. Au moins, il sert à quelque chose !