Alors que les papys cubains effectuent une OPA sur les charts, Cuba, le groupe, sort son premier album. Et ce, après s’être fait les quenottes sur trois maxis qu’on retrouve ici. Si Ashley Bates et Christopher Andrews, les deux moitiés égales de ce duo, n’ont pas 80 piges et n’affichent pas le sourire édenté des musiciens de l’île de Castro, ils ont un point commun avec ces derniers : l’art de façonner une musique qui donne envie de quitter son siège et de remuer du popotin. Mais attention, chez eux, musique à danser n’est pas synonyme de boum-boum en boucle pour pseudo-compile techno-plouc. Il s’agirait plutôt de musique atmosphérique à fort taux de sensualité, sur laquelle il fait bon onduler, à la verticale ou à l’horizontale. Les deux Anglais foulent donc un terrain plutôt encombré à l’heure actuelle, miné, presque, puisque certaines de leurs initiatives tombent un peu à plat, déjà trop entendues ailleurs. Sur Black island, la voix de Shara Nelson cherche à coller le frisson avec ses tonalités éthérées, mais comme tout le monde, de Portishead à Massive Attack en passant par Bows, Lamb ou Gus Gus, s’est essayé à le faire… On préfère Shara minaudant Starshiney, une chansonnette charmante de fausse niaiserie et de vraie fraîcheur.
En revanche, lorsqu’il s’agit de conférer une certaine menace sonore, les Cuba ont eu tout bon en choisissant Mau, rappeur à la gorge chaude qui sévit il y a quelques temps au sein d’Earthling, pour un album et une poignée de maxis d’anthologie. Même chose du côté de l’écriture des morceaux. Le tandem britannique sait torcher une mélodie en l’assaisonnant de loops et de samples inattendus (Peak flow), mais c’est lorsqu’ils s’éloignent des grands courants du moment qu’ils excellent. Leur hommage parodique en forme de clin d’œil (ou quelque chose du genre) à Ennio Morricone est un délice à savourer sans modération : les petits gars s’y lâchent, s’époumonent à trop souffler dans leurs harmonicas et signent une pièce maîtresse de Leap of faith. Le piano « Nick Cavien » et sa tempête de synthèse de Hail Mary et n’importe quelle intervention de Mau -qui dépasse d’une demi-tête l’inquiétant Maxim Reality dans le genre « psychopathe aux cordes vocales enrouées »- sont autant d’autres meilleurs moments. Et ce, sur un album qui les accumule. A bon entendeur…