Quatrième album de M. le Disc Jockey Vadim, effectivement de nationalité russe mais résidant au Royaume-Uni depuis l’âge de trois ans. Partageant une passion commune pour le tennis avec Thierry, guitariste des Thugs (champion de Loire Atlantique en double mixte), M. Vadim a cependant dû renoncer à une carrière sportive à cause d’une blessure au coude à l’âge de dix-sept ans. Peu de temps après il sort ses premiers disques sur son propre label (Jazz Fudge) et le voilà rapper ! En bon rapper, il a plein de copains et les invite sur son disque : on y retrouve donc El-P & BMS (Company Flow -invités partout en ce moment), Blu Rum 13, Iriscience (Dilated Peoples), Swollen Members (Rocksteady Crew), Moshunman (Masters of Illusion, Dr Doom), Sarah Jones (super flow !), Prime Cuts, Mr Thing, First Rate (Scratch Perverts), Skinny Man (Mud Family), Toastie Tailor (New Flesh For Old) Mucho Mu (7 Notas 7 Colores), Blade, Starvin Artists (Jupiter Jam and Jay), Killer Kela. Ouf !
Qui plus est, M. Vadim est un rapper obsédé par l’esthétique soviétique d’avant-guerre. D’où pochette magnifique, comme à l’accoutumée. Est-ce que tout ça fait un bon disque ? Non. Est-ce que ce disque est bon ? Oui.
Pourquoi ? Parce qu’il est varié, bien produit, subtil et original. Non que sampler des 45 tours d’apprentissage de l’alphabet pour enfants (My favourite letter) soit particulièrement innovant -ça ne l’est pas du tout, c’est même terriblement banal- mais scratcher à la vitesse de l’éclair sur des pianos désaccordés et des cordes trop tendues, rapper sur des portes qui grinçent en boucle ou des tranches de musique concrète, ça c’est plus intéressant. C’est même ce qui fait que Vadim sort du lot, un peu à la manière d’un DJ Shadow.
Côté hip-hop, pas de crainte : du beat et des rimes, parfois en espagnol (Pommelo duro), du groove (décalé), des samples de soul, rassurez-vous, il y en a. Vingt-cinq tranches de hip-hop psychédélique pour amateurs friands d’écoute au casque, un cours pratique de tourne-disque (How to exercise the turntable record player), des blagues (From Russia with love, franchement !) et même une petite citation de Lénine (« I don’t know how radical you are or how radical I am, I am certainly not radical enough ; that is, one must always try to be as radical as reality itself »). Jolie phrase, bien que « radicale » ne soit pas le premier adjectif qui vienne en tête à propos de la musique de M. Vadim. Grouillante, plutôt. Je vous fais grâce de la citation extraite de l’épître aux Corinthiens : tous ces rappers ne savent plus quoi inventer pour se distinguer de Puff Daddy et essayer de faire oublier qu’ils sont influencés par DJ Premier. A part ça, Vadim a tout pour lui (même sa liste de références est impeccable) et en plus ses disques sont bons. Mais pourquoi n’a-t-il pas encore samplé Brigitte Bardot ?