Remercions Beck d’avoir créé un nouveau genre, le « Beck », voire le « sous-Beck » pour les moins doués de ses contrefacteurs -exemple : Cornershop fait du « sous-Beck »… Le critique feignassou peut ainsi sans trop se creuser le crâne classer dans une catégorie des artistes un peu trop touche-à-tout… Donc Bran Van 3000 (BV3) fait du « Beck », voire de l' »Hyper-Beck » puisqu’il étend de façon considérable le « folk-groove-punk » du grand échalas américain vers le « hip hop-soul-techno-dance-drum’n’bass-jazz-folk-powerpop-loungecore » et j’en passe… D’ailleurs BV3 n’est pas un groupe c’est un concept-group… Une immense famille de 20 musicos -rappeurs, producteurs, chanteurs/chanteuses…- dirigés par un patriarche plutôt déjanté, Jamie Di Salvio, ex-réalisateur de clips et DJ canadien… Toutes ces contributions apportent une incroyable richesse à l’album qui exploite avec adresse les nouvelles sonorités sans pour autant cracher sur la bonne vieille recette de la chanson acoustique…
Evidemment, brasser toutes ces influences n’est pas sans risques, combien de groupes se sont cassé la gueule en voulant réitérer l’exploit de l’Album Blanc des Beatles. On a fini par craindre comme la peste ces double/triple albums complètement indigestes et rédhibitoires. BV3 s’en sort honorablement en privilégiant la légèreté, l’irrévérence et la déconnade… Di Salvio est un techno-slacker, un joyeux je-m’en-foutiste qui s’écarte des genres pré-digérés, construisant ses morceaux avec des collages défiant le bon goût commun… Il faut l’entendre triturer le rap sur son premier single Drinking in L.A. pour comprendre que ces lascars n’ont pas grand chose à faire des puristes… En véritables hit-makers accomplis, la smala nous lâche quelques perles bien senties, aptes à enthousiasmer les foules que ce soit le disco-trash Old school ou le proto-Beckien Supermodel. Spécialistes de la chanson « flemmarde » -dans le bon sens du terme- telles que Couch surfer ou Exactly like me, les BV3 explorent sans complexes un pan complet du nouveau rock américain en l’emballant de sucreries loungecore ou de beats techno…
Bien sûr il y a à boire et à manger dans ce gigantesque fourre-tout… On pourra rechigner sur la voix trop « classique » de la soul-singer Sarah Johnston qui tire le niveau vers le bas -mais peut-être est-ce du mauvais goût revendiqué genre second degré- , trouver que les tentatives indie-rock (Problems) sont bien pâlichonnes et penser que tout ce fouillis n’est finalement pas aussi « neuf » qu’il voudrait le paraître et qu’il s’inspire un peu trop de ce qui a déjà été fait… Mais le plaisir d’écoute est là et après tout, vous n’êtes pas obligés de penser que BV3 est un groupe qui veut marquer son époque, juste se payer une bonne tranche de rigolade… Peut-être qu’ils ne survivront pas jusqu’au cap difficile du second album, mais il y a fort à parier que leur patron Di Salvio fera une belle carrière…