Encore un nouveau groupe de rap qui casse la baraque, direz-vous, lassé. C’est vrai, les Arsonists débarquent presque sans crier gare au beau milieu du poulailler Matador, plus connu comme l’un des plus fertiles viviers indie US, et sèment la panique. As the world burns, leur entrée en matière, est à mi-chemin entre la nouvelle école (Rawkus et consorts) et le rap old school -un vrai goût pour la parlote. Cependant, on aurait tort de prendre cette bande de tchatcheurs farouchement indépendants -d’où sans doute leur signature sur Matador plutôt que sur une major quelconque- pour de bons mais simples faiseurs. Déjà, à la première écoute, on reste scotché par le flow de ces jeunes gens. Vif, précis, incisif, sans prétention et sans effets de manche, il tue sur place. Shit ain’t sweet, Venom ou Frienemies en attestent.
Par derrière, les rythmiques sont béton, les samples vicieux à souhait, les scratches réduits à leur plus simple expression, parfois un trait pour souligner un beat. En somme, l’habillage sonore ne recèle rien d’exceptionnel, de bêtement clinquant, si ce n’est que tout est à sa place, et placé au bon moment, avec quelques excentricités judicieuses (Pyromaniax). Il est difficile d’expliquer, tant les indices paraissent parfois minces, pourquoi cet album, tout au long de ses 21 titres et interludes, fait mouche presque à chaque fois, avec des titres apparemment simplets dans leur construction (Underground vandal, Session, le torturé et infernal Seed, Halloween), mais c’est pourtant ce qui arrive. Et visiblement, ces cinq-là savent exactement où ils vont.
Loin d’être un album jouissif, As the world burns s’insinue dans l’esprit de celui qui l’écoute, et n’en sort plus. Pas une once de lassitude ne s’installe -la tare la plus fréquente dans les disques de rap, même les meilleurs-, l’album fonctionne exactement comme une œuvre complexe dont on découvrirait, à chaque fois, certaines subtilités, des coups tordus et passionnants là où l’on s’attendait à des banalités efficaces. Un coup de maître dont on espère vivement qu’il ne restera pas sans suite.