Lorsque nous en aurons fini avec le vacarme ambiant des productions d’une époque résolument déjantée, lorsque le silence aura enfin repris place dans nos univers respectifs, l’album éponyme de Mark Hollis -c’est le cas aussi de ses deux productions précédentes- sera l’un de nos seuls réconforts. Il meublera l’espace, de plus en plus distant, qui nous sépare de la réalité.
Riche d’enseignements sur la possibilité de retrait au monde, l’itinéraire de ce compositeur parti tutoyer le sommet des hit-parades dès le début de Talk Talk pour revenir, contre toute attente, à la composition de morceaux d’une beauté désarmante, mérite qu’on s’y arrête. Converti à la musique contemporaine et au jazz, pour la liberté d’expression qu’il octroie, Mark Hollis livre ici sa nouvelle rapsodie en huit chansons habitées de sons palpitants et ponctuées de silences troublants.
Sans aucune concession à la facilité (couplet/refrain, production amplifiée), cet album d’une vitalité incroyable bien qu’indicible trouve des résonnances intimes en chacun de nous. Musique organique mettant nos sens en éveil, musique entièrement acoustique, souple et aérée, elle est le fruit d’une savante élaboration. Cette dernière n’entache en rien la spontanéité de titres magistralement orchestrés par un homme visionnaire, sans doute hors de notre temps, et pourtant si présent. Bref, une œuvre majeure pour les temps à venir.