Affalé sur les canapés de la salle d’une conférence de presse pépère, Sébastien Tellier roule des joints de shit. A l’occasion de la sortie de son deuxième album Politics, un melting pot saucé au rock opéra inclassable, les programmateurs du Transmusicales de Rennes 2003 ont eu la bonne idée d’inviter ce grand chevelu talentueux à jouer des titres live et à répondre aux interviews. Rencontre.
Chronic’art : Tu as invité Mr. Oizo et Xanax des Svinkels sur ton album…
Sébastien Tellier : J’aime l’univers de Quentin Dupieux (Mr. Oizo, ndlr). Il arrive à faire une musique hip-hop et electro qui se détache de ce que l’on entend à droite et à gauche. Il avait déjà bossé avec moi sur L’Incroyable vérité. Les Svinkels ont aussi leur univers, j’aime ca. Je n’ai pas vraiment eu de difficulté à les intégrer à Politics, cela s’est fait de façon naturelle.
Avant ton concert, deux personnes parlaient de ton album. L’un disait que tu faisais de la merde, l’autre lui a rétorqué qu’il ne comprenait pas ta musique parce qu’il n’avait jamais fait l’amour… Comment prends-tu cela ?
Ca me convient parfaitement (rires)… Si les gens qui achètent mon album ont envie de faire l’amour sur ma musique, c’est quelque chose qui me plaît. Mais le premier gars dont tu parles, celui qui n’aimait pas ma musique, il n’aime pas le sexe ?
Il est jeune. Il n’a jamais fait l’amour. Il attend le mariage paraît-il…
Ok (rires). Je comprends. Il va avoir du mal à rentrer dans l’univers de pas mal de musiciens alors, ou il le fera en surface. Et puis le mariage, c’est peut-être pas la solution. Ca peut bouffer l’esprit, un peu. Il faut aller lui parler à ce garçon.
La Ritournelle est un morceau parfait pour faire l’amour… Qu’en penses-tu ?
Ca me fait plaisir d’entendre ça. Je n’ai pas pensé à ça en faisant ce titre, mais il est intéressant de voir la réaction du public, lorsqu’il se met dans des états qui découlent de ta musique. J’aimerais que des millions de gens fassent l’amour sur La Ritournelle, ce serait formidable.
Lorsque ton premier album est sorti, tu conseillais de l’écouter seul, accompagné de la lumière d’une bougie. Pour celui-ci, on a l’impression que tu pourrais nous conseiller de l’écouter en couple ?
Le sexe est une obsession saine. Mon premier album a souvent été qualifié de très « solitaire ». Tu peux aussi avoir du plaisir tout seul. A tort ou à raison. Je pense effectivement que ce second album est plus ouvert, plus chaleureux, sans pour autant être faussement festif. Le sexe est une bonne alternative. Le sexe peut être festif, mais d’une belle manière. Il faut juste trouver les bons ingrédients. Si certains morceaux de mon album font partie de la recette, je dis ok.
Tu as intitulé ton album Politics. Tu es branché politique, ce genre de chose ? Tu veux faire passer des messages ?
Oui et non. C’est une sorte d’introduction à une forme de politique. Tout est politique, sans pour autant ressembler aux hommes politiques. A la base, je fais un programme musical politique et aussi je m’en tape un peu. Je suis sûrement plus sincère que la plupart des gens qui proposent des programmes politiques. Je pense ce que je chante.
C’est quoi ton but musical au niveau scénique ? Faire des concerts dans de petits clubs ou plutôt dans de grands espaces, de grandes salles ?
Je suis plutôt branché grandes salles. Ma musique n’est peut-être pas trop faite pour les petites salles. En même temps je ne sais pas trop, tout dépend du public bien sûr. Je m’imagine bien entouré d’un orchestre, dans un opéra. Le rock opéra avec plein de lumières, puis des bougies, puis l’obscurité…
Tu souris beaucoup plus sur la pochette de ton album que dans la vie…
Tu ne me trouves pas sympa ? Bon. Disons que… j’aime l’idée de pouvoir être accessible. J’aimerais pouvoir aller vers les gens, leur faire des bises, discuter de tout. Je fais des efforts. Mais ça ne correspond pas vraiment à ma personnalité.
On a comparé la musique de ton premier album à celle de Wyatt. Ton deuxième album semble plus personnel, éclaté… Les références sont plus dures à relever.
Tant mieux. J’avais jamais écouté Wyatt avant L’Incroyable vérité. Pour ce deuxième album, je n’ai pas eu d’influences directes non plus. J’écoute un peu de tout. J’aimerais faire des chansons qui durent, des albums qui restent. Pink Floyd est un pur exemple. The Wall est un album qui restera… Un rock opéra de toute beauté. Ca me plairait de faire le même effet qu’un Pink Floyd. Mais en même temps, je ne vais pas aller singer Pink Floyd. Je suis plutôt branché sur moi-même.
Propos recueillis aux Transmusicales de Rennes 2003 par
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