Remake de Plein soleil (1959), Le Talentueux Mr Ripley réussit suffisamment à se démarquer de l’oeuvre originale pour nous intéresser un tant soit peu. Certes, l’intrigue de base demeure à peu de choses près inchangée. Un jeune homme d’origine modeste, Tom Ripley (Matt Damon), se voit chargé par un riche industriel américain de ramener son fils qui se la coule douce en Italie. Mais Ripley, immédiatement et totalement séduit par Dickie (Jude Law), son mode de vie, son insouciance, oublie sa mission. Il finira par le tuer et prendre sa place. Les moyens mis en œuvre par Anthony Minghella pour s’approprier l’œuvre de Patricia Highsmith sont autres ; ajout de personnages et surtout accentuation de certains thèmes sous-jacents (principalement l’homosexualité de Ripley et accessoirement la lutte des classes). Mais n’est-ce pas le propre de la vague des remakes américains de rendre explicite ce qui nécessitait jusque-là un certain sens de l’observation, une capacité d’interprétation ?
Le décodage de l’oeuvre se fait cependant cette fois-ci de manière relativement fine (rien à voir avec les catastrophiques Hantise ou Diabolique). Certains effets sont certes un peu trop appuyés, -pour évoquer, par exemple, la personnalité trouble de Ripley, le réalisateur ne trouve pas mieux que de garnir ses plans de miroirs, de vitres réfléchissant le visage de Matt Damon-, mais le film reste quoiqu’il en soit un thriller psychologique honorable, plutôt plaisant. Dommage qu’il ne bénéficie pas de l’atout majeur du film originel : Alain Delon. Delon véritable soleil noir dans l’œuvre de René Clément réussissait à provoquer des sentiments contradictoires chez le spectateur, un mélange d’attraction-répulsion pour ce personnage d’assassin, de faussaire. Matt Damon, acteur peu charismatique, ne suscite pas grand-chose, excepté une légère pitié déplacée. Basé sur le thème du transfert de personnalité, Le Talentueux Mr Ripley n’est pas très heureux quant à son passage de relais en matière d’interprétation.