Dans les années 70, Ettore Scola faisait déjà de mauvaises comédies, tout en signant de nombreuses œuvres militantes, notamment pour le PCI. Aujourd’hui il ne milite plus, et prouve qu’il n’est jamais trop tard pour retourner sa veste en réalisant le film le plus bourgeois de l’année. A force de délaisser les salles de cinéma et les meetings pour des repas d’affaires bien arrosés, le cinéaste italien a fini par se résigner à voir le bon côté des choses (car si la vie c’est dur, un plat de fetuccini c’est bon). S’inspirant de ce qui l’occupe le plus dans la vie, c’est tout naturellement qu’Ettore Scola a eu la brillante idée de faire Le Dîner, dont l’idée se résume à : un restaurant. Le scénario, qui s’articule autour des conversations de plusieurs tables, n’est qu’un énorme écheveau de dialogues dignes du pire théâtre de boulevard français. Chaque personnage est un cliché vivant, chaque situation la mise en images d’un fantasme de l’univers bourgeois. Le plus gros du film repose en outre sur d’invraisemblables histoires d’adultère misogynes où la femme tient systématiquement le rôle de l’emmerdeuse (le comble étant atteint lorsqu’un homme d’âge mûr persécuté par sa jeune maîtresse nous lance un regard suppliant).
Dans cette triste dépense de temps et d’argent, la caméra n’a qu’un rôle mineur. Elle est l’esclave enregistreuse des moindres faits et gestes de toute une basse-cour d’acteurs célèbres, livrés à eux mêmes, qui jouent à celui qui criera le plus fort. Quant au montage, il ne fait que suivre le découpage prévu par le scénario, ça se sent : après chaque réplique supposée drôle ou quand un plat arrive, on change de plan (donc le plus souvent de table). Et puis il y a cette musique insupportable qui respire la joie de vivre « à l’italienne » et la légèreté. Et puis cet éclairage diffus de studio, qui « embellit » et met à l’aise. Et puis, et puis… Et puis assez de ces films en sauce ! Le cinéma, ça n’est pas fait pour l’estomac.