Nicolas Cage, le cheveu long et peroxydé, jambes écartées et paumes ouvertes façon Rahan : un programme en soi, que Hell driver 3D juge bon d’intégrer à un scénario de road movie surréaliste (« fantastique » serait réducteur). En fait d’intrigue, c’est un maelström de fun, une cavalcade supersonique des poncifs les plus délavés de l’action movie – gunfights burlesques, bastons de greluches dénudées, baroudeur mystérieux qui s’en va sans regarder les explosions derrière lui. Mais ici, tous ces clichés ne se succèdent pas : ils se télescopent, dans un pastiche simultané de l’école Michael Bay et des délires Grindhouse de Rodriguez. On a affaire à l’évidence à l’une de ces séries B qui raillent la machine hollywoodienne de l’intérieur, en sautant à pieds joints dans ses rouages marketing.
L’idée, donc, est de s’en payer une tranche, bien plus que d’admirer le show d’esbroufe en trois dimensions. Mais qu’est-ce qui distingue Hell driver 3D d’autres pantalonnades maquillées en exploit technologique, comme Piranha 3D ? Sans doute son jusqu’au-boutisme, qui assume pleinement la laideur et le kitsch sans jamais signaler son second degré, à l’inverse des parodies officielles type Machete : tout (cascades de karaté contorsionniste, volées de 22 long rifle au ralenti) est ici outrageusement boursouflé. Si bien que deux degrés de lecture cohabitent en permanence, l’excès de sérieux conduisant au comique – ou l’inverse, c’est selon. Jolie prouesse, à l’heure d’une certaine uniformisation du cinéma bis, que de semer la confusion dans l’esprit du grand public, lequel ne sait pas trop si le nanar, cette fois-ci, est assumé : convient-il d’en rire, d’en pleurer ou de prendre son pied ? Si finalement on s’esclaffe, c’est que Cage déploie des trésors de drôlerie pince-sans-rire, réconciliant ses mines hallucinées avec ses airs d’ange exterminateur, quelque part entre le freak romantique de Sailor et Lula et le ringard ténébreux de Ghost rider.
L’esthétique du joyeux bordel a tout de même ses limites ; passé un certain point, on se surprend à regretter l’absence d’une trame digne de ce nom. C’est que l’enjeu original – Cage piste l’assassin de sa fille, un affreux gourou sataniste – est vite broyé sous l’agrégat de sketchs grand-guignolesques. En un sens, c’est heureux : qui a peur d’un méchant redneck gothique qui envoie des cerceaux de feu, ou d’un agent du FBI prestidigitateur, cousin dégénéré de l’agent Smith ? Déjà responsable de Halloween 3D ou Meutres à la St-Valentin, Patrick Lussier (réalisateur et co-auteur) l’a bien compris, et n’hésite donc pas à remplacer l’unité scénaristique par un panel de références archi éculées, tirées de blockbusters trendys puis redistribuées en vrac. C’est là toute la magie (noire) de Hell driver 3D : rassembler tout ce que le film d’action mainstream a de pire, pour ne surtout rien y changer. Preuve que la finesse peut se cacher dans l’excès orgiaque.