L’occasion est rare en ces pages de chanter les louanges d’un cinéma d’animation francophone capable de rivaliser avec l’inventivité des créations sinon Pixar, du moins Aardman (Creature comfort, Wallace et Gromit). S’il y a bien une ou deux étincelles ponctuelles (disons Sylvain Chomet), force est de constater qu’en France, l’animation est un terrain moins partagé qu’en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis. Le succès n’y fait même rien : pour exemple, l’hilarante série Panique au village (vingt épisodes de 5 minutes diffusés en 2003 sur Canal +) ne fut pas reconduite. Toutefois, après un heureux tour du monde des festivals, la réussite de la série imposa l’idée d’un long-métrage. Et à voir ce qu’avait par exemple donné la pauvrette adaptation des Lascars, le pari d’un format étiré (passer de 5 à 75 minutes) pouvait relever de la gageure. Et pourtant.
C’est l’anniversaire de Cheval. Cowboy et Indien décident de lui offrir de quoi construire un barbecue mais une erreur se produit dans la commande et les voilà submergés sous un milliard de briques. C’est le début d’une série d’aventures déjantées qui les conduira au centre de la terre, de l’autre côté du monde, en Atlantide ou plus simplement au fameux village du titre. Sorte de Toy story artisanal, Panique au village obéit à une logique d’animation purement naïve : personnages stoïques, grossièrement remués par une main invisible, scénario délirant, dialogues fantasques, décors cheap, improbabilité des liens (cow-boy et indien sont copains) et hasard des situations. Le caractère enfantin du film lui confère une grande liberté (les différences d’échelle entre personnages et décor) confinant parfois à un je-m’en-foutisme d’une fraîcheur insolente.
S’inspirant du comique absurde comme du rythme effréné de South park et des créations de Matt Groening (Les Simpson, Futurama), Panique au village s’amuse à confronter son manque de moyens à des références beaucoup trop grandes pour lui (Psychose, Voyage au centre de la terre). On regrettera toutefois que l’excellent film de Vincent Patar et Stéphane Aubier se complaise tant dans son absence de prétention. Mais s’identifiant idéalement aux séries B de Jack Arnold (le superbe Etrange créature du Lac noir), Panique au village s’invente néanmoins un espace de création à sa mesure, la série BB.